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Taux de pondération de la Cobac : Les Etats de la Cemac sur le point de conduire le système bancaire vers un risque systémique

En date du 18 Octobre 2024, le Secrétaire Général de la COBAC (Commission Bancaire de l’Afrique Centrale),  Marcel ONDELE, par lettre circulaire référencée LC-COB/32, dont l’objet est « lettre circulaire relative aux pondérations des engagements portés sur les États de la CEMAC 2024/2025 », adressée aux Présidents des Associations Professionnelles des Établissements de Crédit (APEC) de la CEMAC, renseigne qu’au terme de ses délibérations, le conseil des ministres de l’Union Économique de l’Afrique Centrale (UEAC), réuni en 42ème session ordinaire le 11 octobre 2024 à Bangui, en République Centrafricaine, a adopté le rapport de surveillance multilatérale 2023, sur la base duquel les pondérations applicables aux engagements des États de la CEMAC (fin 2024 et 2025) sont les suivantes :

–          CAMEROUN : Taux de pondération 90% ;

–          CENTRAFRIQUE : taux de pondération 85% ;

–          CONGO : Taux de pondération 80% ;

–          GABON : Taux de pondération 100% ;

–          GUINÉE ÉQUATORIALE : Taux de pondération 85% ;

–          TCHAD : Taux de pondération 90% ;

Ceci, faute de non-respect par ces pays, des critères de convergence de la surveillance multilatérale, qu’ils se sont eux-mêmes imposés,  les mettant en situation de non-conformité aux exigences réglementaires COBAC.

Ces taux de pondération supérieurs ou égaux à 80%, indiquent que les engagements des banques envers ces états sont considérés comme présentant un risque de crédit relativement élevé ou très élevé comme le cas du GABON. Les signatures des états de la CEMAC ne sont plus fiables, synonyme de la mauvaise santé économique et financière de ces états. Ces taux de pondération auront un fort impact sur le capital et les liquidités des banques, en ce sens qu’elles seront désormais obligées de conserver plus de capital sous forme de fonds propres ou réserves, pour couvrir leurs engagements sur les États. À titre d’exemple, désormais dans le cas du Cameroun, toute banque de la CEMAC qui souhaiterait financer l’État du Cameroun devra constituer 90% du montant engagé sous forme de réserves ; pour 100 000 FCFA prêtés au Cameroun elle devra avoir 90 000 FCFA sous forme de réserves, montant qu’elle aurait pu utiliser pour financer tout autre agent économique.   

Rareté des liquidités

Les liquidités se feront de plus en plus rare la période fin 2024 et 2025. Ceci affectera la capacité des banques à prêter aux agents économiques ou à investir dans d’autres actifs. Causant de fait un ralentissement de l’économie. Toute banque ayant une exposition importante sur un état, pourrait être plus vulnérable aux chocs économiques ou aux crises souveraines, affectant ainsi sa stabilité financière.

Le critère de convergence « solde budgétaire de référence » de la lettre circulaire, nous renseigne que les États de la CEMAC majoritairement (à l’exception du CONGO) dépensent plus qu’ils ne génèrent de revenus. L’expression d’une mauvaise gestion financière de ceux-ci ; une dépendance excessive à l’emprunt ou un manque d’efficacité dans la collecte des recettes fiscales.  Mettant les États en incapacité d’honorer leurs engagements futurs, d’où la pondération élevée pour préserver les banques des défauts de paiements.

Le critère de convergence « Taux d’inflation annuel moyen » de la lettre circulaire, respecté uniquement par la Guinée Équatoriale et dont le Cameroun a réussi l’exploit  d’être le major sous régional en matière d’inflation en ayant une inflation supérieure au double du taux moyen admis, nous renseigne sur l’érosion du pouvoir d’achat  des consommateurs en CEMAC, toute chose qui nuit gravement à la stabilité économique et incitera la banque centrale à augmenter ses taux d’intérêts pour contrôler l’inflation, ce qui ralentira la croissance de l’économie en 2025 et affectera la capacité de remboursement des États. 2025 sera décidément une année difficile pour les États de la CEMAC.

Le critère de convergence « Stock de la dette publique intérieure et extérieure » de la lettre circulaire, respecté par la majorité des États à l’exception du CONGO et du GABON, pourrait inciter quelques acteurs du marché financier, en l’occurrence les sociétés de bourse, qui ne sont pas assujetties aux normes prudentielles des banques à solliciter des agréments en qualité de SVT (Spécialistes en Valeurs du Trésor) pour mobiliser l’épargne public afin de soutenir ces États. Une décision qui pourrait mettre en difficulté le marché financier sous régional, quand on sait que nos États ne sont pas familiers aux principes, entre autres de transparences, de conformité réglementaire, de communication, etc. Il est plus que vital que la COSUMAF (Commission de Surveillance du Marché Financier de l’Afrique Centrale) attire l’attention des acteurs du marché financier sur la dangerosité d’une telle démarche, au regard des valeurs de nos États en matière de bonne gouvernance.

Le fait que ces différents États aient bénéficié de ces taux de pondération, du fait de leur non-conformité aux critères de convergence de la surveillance multilatérale, signale la survenance d’un risque systémique au sein du système bancaire et financier de la CEMAC, avec des implications plus larges pour la stabilité économique sous régionale.

Par M. Ange NGANDJO (Banquier-Consultant), Octobre 2024.

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