La multinationale française Danone a annoncé le 4 novembre 2025 la fermeture programmée de son site historique de production de céréales infantiles de Villefranche-sur-Saône, marquant potentiellement la fin de la présence des produits emblématiques Blédine et Phosphatine sur les marchés africains. Cette décision, qui interviendra en juillet 2027 après un processus de consultation sociale, s’inscrit dans un contexte de déficit structurel de compétitivité et d’une chute spectaculaire de l’activité de 50% au cours des deux dernières décennies.
Le groupe, qui produit depuis plus de 140 ans ces céréales destinées à l’alimentation des nourrissons, invoque deux facteurs tels que la décroissance du marché européen, affecté par la baisse significative de la natalité et l’évolution des habitudes alimentaires des jeunes parents, avec une diminution de 35% des volumes commercialisés sur les cinq dernières années. Et de manière peut-être plus révélatrice, le « déficit de compétitivité sur le marché africain ».
« Malgré tous les efforts et investissements déployés par l’entreprise et l’engagement continu de tous nos collaborateurs, nous sommes contraints d’envisager la fermeture », a déclaré Timothée Coppéré, directeur du site, dans un communiqué officiel. Les chiffres témoignent effectivement d’une tentative de maintien de l’activité : près de 134 millions d’euros ont été investis dans l’usine de Villefranche au cours de la dernière décennie, dont 50 millions pour la modernisation des équipements et 84 millions de subventions internes destinées à compenser les pertes d’activité et de volumes. Malgré ces efforts financiers considérables, le site fonctionne actuellement à moins de la moitié de ses capacités d’utilisation.
L’Afrique, un marché de plus en plus compétitif et exigeant
Le « déficit de compétitivité » évoqué par Danone sur le marché africain interpelle. Alors que le continent africain connaît une croissance démographique soutenue, avec une population jeune en expansion constante, perdre pied sur ce marché s’expliquerait à différents niveaux. En effet, l’émergence de producteurs locaux africains favorise l’industrialisation locale et la transformation des matières premières sur place. Ces acteurs bénéficient de coûts de production et de distribution plus faibles, ainsi qu’une meilleure compréhension des préférences locales.
Aussi, la concurrence internationale s’est intensifiée ces dernières années, avec l’arrivée massive de produits asiatiques, notamment chinois, proposant des prix très compétitifs. Ces produits ont progressivement conquis des parts de marché, notamment dans les segments populaires et moyens.
En dernier ressort, il faut également noter l’évolution des habitudes alimentaires et une prise de conscience croissante des consommateurs africains concernant la composition des produits importés. Les scandales sanitaires passés liés à certains produits infantiles importés ont renforcé la méfiance et favorisé soit le retour à des préparations traditionnelles, soit l’adoption de marques locales perçues comme plus adaptées.
Toutefois, la fermeture de l’unité de production de Villefranche-sur-Saône pose également la question de l’approvisionnement futur des marchés africains en produits Blédine. Danone n’a pas communiqué clairement sur ses intentions : le groupe compte-t-il maintenir sa présence sur ces marchés en important depuis d’autres sites de production, potentiellement situés hors d’Europe, ou s’agit-il d’un retrait pur et simple de ces segments de marché ? Le groupe saura rebondir sur d’autres segments du marché africain ?
Rappelons que le marché africain de l’alimentation infantile, estimé à plusieurs milliards d’euros et en croissance continue, attire désormais de nombreux acteurs. Des groupes marocains, camerounais, égyptiens, nigérians ou sud-africains développent leurs propres gammes de céréales infantiles, souvent enrichies et adaptées aux spécificités nutritionnelles locales.
