Pouvez-vous nous présenter le projet FISH4ACP ?
Le projet Fish4acp est une initiative de l’organisation des Etats d’Afrique, du Caraïbe et du Pacifique, qui a pensé soutenir les Etats membres pour résoudre les questions de pêche. Ce projet a été validé et financé par l’Union européenne (UE), et le ministère allemand à la coopération (BMZ). C’est un programme qui s’étend sur 12 pays dans le monde, et au Cameroun, ce projet porte sur la chaîne de valeur de la pêche à la crevette. Cette chaîne de valeur a connu beaucoup de problèmes au niveau national. Déjà en 2006, il y a eu cette auto-suspension d’exportation des produits de la pêche, vers les pays le marché de l’Union européenne, qui était le marché traditionnel des crevettes camerounaises. Du coup, la pêche a traversé une période assez difficile. C’est à la suite de ce problème que le projet Fish4acp a été initié. De 2006 à 2021, le Cameroun était sous le coup d’une auto-suspension de ces produits vers l’UE, la crevette étant le principal produit d’exportation, qui génère des devises à notre pays.
Comment est-ce que ce projet est mis en œuvre sur le plan national ?
Le projet a commencé en 2021 ici au Cameroun par une analyse des chaînes de valeur. Cette analyse a permis d’identifier les principales contraintes qui minent le secteur. Par la suite, il y a eu une stratégie de mise à niveau de ce projet, qui a été lancé en octobre 2022. Cette stratégie est déclinée en trois axes. Le premier axe consiste à assurer une pêche durable, l’axe deux quant à elle vise à améliorer la qualité sanitaire et l’accès aux marchés les plus rémunérateurs, et enfin le troisième axe, assurer une gouvernance accrue du secteur de la pêche. C’est sur ces trois axes que se déroulent donc l’ensemble des activités qui visent à mettre à niveau, cette chaîne de valeur. Le projet Fish4acp vise d’abord la structuration de cette chaîne de valeur. Cette structuration a commencé par la suscitation de la mise en place d’une plateforme d’acteurs qui compte près de 70 membres. C’est ces acteurs que le projet accompagne dans la mise en œuvre de ce projet. Ce n’est pas seulement le Minepia, qui est le principal bénéficiaire qui travaille, mais, il y a tous ces acteurs et les parties prenantes. Parlant de la plateforme, elle est constituée des pécheurs, de ceux qui sont impliqués dans la transformation, et même dans la commercialisation, les ONG… Tous ces gens font partie de la plateforme pour réfléchir sur les questions de la pêche, et remonter les problèmes de la base, vers à la fois le projet, et le Minepia. A côté des activités qui se déroulent sur le terrain, il y a des formations que nous offrons aux acteurs. On a eu à former sur la gouvernance du secteur à travers les points focaux. Nous avons eu à faire des formations sur la qualité hygiénique et sanitaire des produits de la pêche. Actuellement, nous sommes en train de démarrer la mise en place du plan de gestion de la pêcherie crevettière qui va permettre de donner ce cadre concerté de la gestion durable de la ressource halieutique. Le projet Fish4acp a aussi contribué à la révision de la loi des pêches, en collaboration avec le Minepia. C’est-à-dire que le projet travaille en bonne collaboration avec le ministère.
Quelle quantité de crevettes le Cameroun produit actuellement par an ?
Nous avons réalisé une enquête cadre sur la pêche artisanale maritime, qui nous a permis d’avoir de nouvelles données sur l’activité de pêche. On déclarait par le passé que le Cameroun produisait 590 tonnes de crevettes chaque année. Mais, notre étude nous a démontré que la pêche industrielle produit 4200 tonnes par an, pendant que la pêche artisanale produit 6000 tonnes par an. Donc nous sommes à une production de plus de 10 000 tonnes de crevettes par an. C’est grâce à la mise en œuvre concertée des activités du projet avec le Minepia. Aujourd’hui, nous avons déjà formé des observateurs scientifiques qui vont embarquer à bord des bateaux de pêche industriels, pour continuer la collecte des données. Le projet travaille à ce que les acteurs puissent voler de leurs propres ailes, dans un cadre structuré et qu’ils continuent à mettre en œuvre d’autres activités de la stratégie décennale (2022 – 2032). Le projet Fish4acp lui va s’arrêter en 2026. Il est question que les acteurs continuent à mettre en œuvre certaines activités du projet.
En dehors de Kribi et Douala, est-ce que le projet Fish4acp s’étend dans d’autres régions du Cameroun ?
Le projet a ciblé la crevette issue qui est pêchée sur notre façade maritime, longue de 402 km, qui va de la péninsule de Bakassi, à Campo. Cette façade a des principaux sites, notamment Limbé, Douala et Kribi. Aujourd’hui, nous sommes en train de célébrer la crevette ici à Kribi parce qu’elle a été choisie pour servir comme ville pilote. Nous nous servons du prétexte de la célébration de la journée mondiale de la pêche, pour venir promouvoir la crevette qui est le produit phare qui a donné son nom à notre pays, et qui est pour l’instant, le principal produit d’exportation.
Vous avez indiqué plus haut que le Cameroun produit annuellement plus de 10000 tonnes de crevettes. Qu’est-ce que cela génère en termes de revenu à l’économie camerounaise ?
La chaîne de valeur des crevettes génère près de 50 milliards de FCFA. C’est un secteur vraiment rentable au niveau de tous les maillons de la chaîne, depuis le pêcheur jusqu’au consommateur final. Malheureusement, les crevettes sont des produits de mer, et elles coûtent chères. Même si ces crevettes ne sont pas à la portée de tous les ménages, elles se retrouvent d’une manière ou d’une autre, distribuées dans les plats, sous différentes formes : à l’état frais, séché, ou fumé.
C’est encore le lieu de remercier les OACP, l’Union européenne, le ministère fédéral de la coopération allemande… Nous les remercions d’avoir vu juste pour soutenir le Cameroun dans ses efforts à restructurer, et à relancer ce secteur porteur. Il faut savoir par exemple que, rien que pour la pêche à la crevette, on a compté près de 11000 travailleurs, que ce soit à temps plein ou à temps partiel, qui tirent leurs revenus directement de l’activité de pêche. Donc c’est un secteur qui participe aussi à la création des emplois aussi bien pour les jeunes, personnes âgées, que pour les femmes.