Entrepreneuriat féminin : Les voies pour améliorer l’accès aux financements - L'Economie - Actualité économique, Cemac, Afrique

L’accès au financement est crucial pour la réussite de tout projet entrepreneurial. L’entreprenariat désigne un processus dynamique par lequel un individu appelé « entrepreneur » ou un groupe d’individus explore ou crée et exploite des opportunités commerciales afin de produire des produits supplémentaires et de fournir de nouveaux services au marché.

En Afrique, l’entrepreneuriat féminin représente un potentiel économique considérable. Cet intérêt découle du fait de la considération des femmes entrepreneures comme des forces importantes du développement économique de leurs pays.

Cependant, le genre féminin est confronté à des défis structurels et institutionnels en ce qui concerne l’accès aux financements nécessaires à la croissance de leurs entreprises. Ceci dans un contexte où les femmes occupent une place importante dans le développement économique et social. En conséquence, de nombreuses femmes entrepreneures se tournent vers des sources de financement informelles ou non conventionnelles, ce qui peut limiter leur croissance et leur durabilité.

De plus, les institutions financières, souvent réticentes dans l’octroi de financements aux femmes, exacerbent cette situation en imposant des conditions de crédit strictes et en négligeant les besoins spécifiques des entreprises dirigées par celles-ci. En effet selon les statistiques de la Banque mondiale bien que, les femmes détiennent environ 30 % des entreprises en Afrique, elles rencontrent souvent des difficultés pour obtenir des prêts et des investissements.

Un rapport de la Banque Africaine de Développement (BAD) ajoute que, les femmes entrepreneures en Afrique ont besoin d’environ 42 milliards de dollars de financement non satisfait chaque année. Par ailleurs, une étude de McKinsey Global Institute a révélé que si les femmes avaient un accès égal aux opportunités économiques, cela pourrait ajouter 28 milliards de dollars à l’économie africaine d’ici 2025.

Fondements théoriques

La théorie de la dépendance des ressources, développée par Pfeffer et Salancik, pour qui les entreprises dépendent des ressources externes pour survivre et croître. Autrement dit, les femmes entrepreneures peuvent avoir plus de difficultés à accéder à ces ressources en raison de préjugés systémiques et d’un manque de garanties. On peut également se référer à la théorie de l’entrepreneuriat féminin analysée par Brush et Gatewood qui soulignent que les femmes font souvent face à des obstacles uniques, tels que des stéréotypes de genre et un accès limité aux réseaux de financement. Enfin nous convoquons la théorie des institutions, explorée par Douglass North, dont l’accent est mis sur le rôle des institutions dans le développement économique. Au demeurant, des institutions financières souvent biaisées et des politiques de crédit inadaptées peuvent restreindre l’accès des femmes au financement. Par ailleurs, des réformes institutionnelles sont donc nécessaires pour améliorer cet accès. D’où la mise en place des politiques et des programmes pour améliorer l’accès au financement.

Des initiatives à pérenniser

Pour inverser la tendance, certaines mesures ont été prises par certaines institutions financières internationales. L’on a entre autres, l’initiative « Affirmative Finance Action for Women in Africa » (AFAWA) de la BAD qui a pour objectif de soutenir l’autonomisation économique des femmes entrepreneures en Afrique, en facilitant leur accès au financement eten réduisant les barrières financières auxquelles elles sont confrontées. « Boost Africa » est également une initiative lancée conjointement par la BAD et la Banque européenne d’investissement (BEI), dans le but de créer un environnement propice à l’entrepreneuriat sur le continent. A celles-ci s’ajoute, l’Initiative de financement des femmes entrepreneures de la Banque mondiale, qui a consacré un fonds d’1 milliard de dollars pour les soutenir et faciliter leur accès au financement. On note également des institutions de microfinance qui se concentrent sur le financement des femmes, offrant des prêts adaptés à leurs besoins. Des initiatives comme She Leads Africa et Women’s World Banking aident à former et à connecter les femmes entrepreneurs avec des investisseurs. Malgré toutes ces initiatives pour ne citer que celles-là, les femmes entrepreneures demeurent confrontées à de nombreux défis.

Pas d’actifs à mettre en garantie

L’un des principaux obstacles à l’accès au financement est la discrimination de genre. Autrement dit, les femmes entrepreneures sont souvent perçues comme moins crédibles que leurs homologues masculins, ce qui peut influencer les décisions des prêteurs. Suivi du problème de l’éducation financière, qui se caractérise par un manque de connaissances en gestion financière et en élaboration de plans d’affaires. De plus, le manque de garanties des femmes peut s’expliquer du fait que beaucoup de femmes n’ont pas d’actifs à mettre en garantie, ce qui les rend moins éligibles pour des prêts. Nous évoquons également le problème de réseaux limités, car les femmes ont souvent moins de réseaux professionnels, ce qui peut restreindre leurs opportunités de financement.

Nous pouvons également citer le manque d’espace et de locaux de travail, l’inadéquation de la main-d’œuvre, la concurrence, la charge fiscale, le faible niveau d’éducation, le contexte professionnel, la motivation, l’environnement social, la responsabilité culturelle et familiale, la discrimination familiale (patriarcat) et l’accès à la formation.

Frein à la création d’emplois

L’absence d’accès au financement pour les femmes entrepreneures a des répercussions non seulement sur leur développement personnel, mais aussi sur l’économie dans son ensemble. En limitant la capacité des femmes à créer et à développer des entreprises, on freine l’innovation, la création d’emplois et la croissance économique.

Compte tenu de son enjeu crucial pour le développement économique et l’égalité des genres en Afrique, il est inéluctable de faire des recommandations concrètes pour renforcer l’accès au financement de ces dernières, contribuant ainsi à un développement économique plus inclusif et durable sur le continent.

Initier un fonds dédié à l’entrepreneuriat féminin

D’abord, créer des fonds de financement spécifiquement destinés aux femmes entrepreneures, gérés par des institutions financières publiques ou des partenariats public-privé pourraient offrir des prêts à taux réduit ou des subventions.

Ensuite, mettre en place des programmes de formation et sensibilisation pour les femmes sur la gestion d’entreprise, la rédaction de plans d’affaires et la gestion financière. Cela les aiderait à mieux comprendre les exigences des prêteurs et à renforcer leur confiance. Outre cela, promouvoir la création de réseaux de femmes entrepreneures et d’associations professionnelles qui peuvent offrir du mentorat, des conseils et des opportunités de mise en réseau.

Enfin, mettre en place des mécanismes d’évaluation pour suivre l’impact des politiques mises en œuvre et ajuster les stratégies en fonction des résultats obtenus. Sans oublier que le développement des institutions de microfinance qui se concentrent sur les femmes peut aider à surmonter certains des obstacles liés aux garanties et à la discrimination.

Surmonter ces défis, nécessite une approche multiface qui implique des efforts de la part des gouvernements, des institutions financières et de la société civile. Et par ricochet, la mise en place des politiques et des programmes qui favorisent l’accès au financement pour les femmes entrepreneures.

En investissant dans l’entrepreneuriat féminin, l’Afrique peut non seulement améliorer la vie des femmes, mais aussi stimuler sa propre croissance économique.

Michelle Josée Ekila,

Economiste en Histoire, Institutions et Développement

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