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Problématique des paiements en devises en zone Cemac :  Des solutions ?

(Leconomie.info) - Selon la BEAC dans son Rapport sur les services de paiements dans la CEMAC en 2022, plus de 76.000 transactions de paiement hors zone CEMAC ont été traitées en 2022 par la banque centrale à travers le réseau SWIFT principalement, pour un total d’environ 3.500 Milliards FCFA, et une moyenne par transaction de 45,8 millions FCFA.

Si ces statistiques présentent les signes d’une réelle reprise post COVID des échanges commerciaux avec marchés étrangers pour la zone CEMAC, force est de constater pour le déplorer, que plusieurs opérateurs économiques se plaignent encore de contraintes opérationnelles pour effectuer des paiements hors CEMAC auprès de leurs banques. Celles-ci engendrent des retards pouvant s’étendre jusqu’à 90 jours depuis la date d’exécution du virement (et de débit du compte de l’émetteur) jusqu’à la réception confirmée des fonds par le bénéficiaire.

Réflexion

De manière structurelle et en lien avec leurs activités, plusieurs opérateurs économiques de la zone CEMAC importent des biens et services qu’ils sont amenés à régler en devises (EUR, USD, GBP, CAD, XOF, RMB, AED, …).

Pour les plus efficaces, ils arrivent à négocier auprès de leurs fournisseurs étrangers des modalités de paiement aménagées leur permettant d’utiliser leur trésorerie de manière optimale (lettres de crédit, avance à la commande et solde à la livraison, crédit fournisseur de 30 à 90 jours, etc. …)

La problématique de retard de paiements à l’international rencontrée sur le terrain proviendrait essentiellement de quelques causes :

  • Des lenteurs administratives dans la gestion des demandes de paiements par les banques commerciales et la banque centrale liées notamment à la qualité des dossiers ;
  • Un manque occasionnel de devises sur le marché local qui entraine une spéculation sur les cours des devises vis-à-vis du FCFA ;
  • Un manque de formation adéquate pour les principaux acteurs pour une meilleure maîtrise des textes et évolutions majeures sur la réglementation des changes en vigueur ;
  • Une relative méconnaissance des outils et nouvelles solutions de paiements disponibles de nos jours avec l’arrivée des FINTECH et leur offre technologique dont profiteraient aussi bien les banques que les usagers.

Conséquences/impacts 

Le GICAM dans son Tableau de bord sur l’économie n°16 fait savoir que 70% des entreprises qui effectuent des transactions internationales continuent à éprouver des difficultés dans le traitement des transferts malgré les mesures mises en place.

Cette situation alourdit les délais de paiement et fragilise la relation de confiance entre les opérateurs économiques locaux et leurs fournisseurs et/ou investisseurs à l’étranger. La conséquence directe est la perte des facilités commerciales qui conduit à l’augmentation des coûts d’importation (variation des prix, des taux de change), la baisse du niveau de production locale et des stocks disponibles sur le marché, des tensions de trésorerie et plus globalement un impact direct sur le niveau d’inflation.

Proposition

De prime abord, nous devons apprécier les efforts de la banque centrale en ce qui concerne les textes sur la réglementation des changes dans la CEMAC et la lettre circulaire n°002/GR/2022 qui explicite la documentation à fournir par la clientèle en fonction de la nature des opérations.

Les dispositions règlementaires étant clairement énumérées et au vu des griefs relevés plus haut, le problème serait une asymétrie d’information entre les opérateurs économiques, les banques commerciales et la banque centrale.

Pour combler ce gap et harmoniser le circuit d’information entre les différents acteurs, l’éducation financière suivie d’un accompagnement adéquat se positionnent comme des pistes de solutions :

  • La vulgarisation de consultations, concertations et séminaires impliquant et/ou aminés par la banque centrale, les banques commerciales, les représentations patronales et les cabinets conseils autour de ces sujets importants ;
  • L’accompagnement des différentes parties prenantes de cet écosystème pour une meilleure compréhensions des contraintes règlementaires, la gestion des challenges opérationnels pour fournir la documentation requise mais également sur les opportunités découlant des avancées technologiques en matière de paiements ;
  • La sensibilisation faite par des spécialistes auprès des opérateurs économiques et même des banques sur les avantages d’une gestion appropriée du risque de change ;
  • Enfin, le renforcement et la mise en œuvre effective des initiatives de mise en place par la banque centrale de guichets spéciaux pour le traitement dédié de certaines opérations jugées sensibles / stratégiques avec pour effet positif la réduction des délais de traitement des transactions en général, et la dynamisation de l’investissement direct étranger (IDE) vers nos économies sous régionales en particulier.

Conclusion

La bonne gestion des paiements en devises représente un enjeu majeur pour les économies de la zone CEMAC qui sont encore majoritairement tournées vers l’importation et les financements étrangers. Il devient alors urgent d’adresser de manière pérenne ces problématiques opérationnelles en impliquant de manière constructive tous les acteurs clés autour d’une même table afin soutenir durablement la dynamique de croissance économique de notre sous – région.

Patrick A. FOMETHE

Administrateur Directeur Général KORI ASSET MANAGEMENT SA (KAM)

KAM est une société de gestion de portefeuille agréée –  SGP – COSUMAF 01/2023

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