Le secteur de l’eau et de l’électricité au Gabon est confronté à une crise financière sans précédent. Un audit présenté en Conseil des ministres le 4 décembre a mis au jour un déficit stupéfiant de 84,7 milliards de FCFA dans la province de l’Estuaire, la plus peuplée du pays.
Ce gouffre financier, qui équivaut à des mois de recettes publiques, illustre les limites d’un système miné par la fraude et des défaillances de gestion, comme le révèlent des rapports successifs sur la Société d’Énergie et d’Eau du Gabon (SEEG).
Le cercle vicieux des impayés et des connexions illégales
Historiquement, la SEEG enregistre des pertes annuelles estimées entre 30 et 40 milliards de FCFA dues principalement à la fraude. Ces irrégularités incluent des connexions illégales, des manipulations de compteurs et des non-paiements massifs. Dans le Grand Libreville, les pertes mensuelles en électricité dépassent à elles seules les 2 milliards de FCFA.
Qualifié d’alarmant par les autorités, le déficit actuel découle d’une combinaison de facteurs : surfacturations systématiques, impayés accumulés et lacunes flagrantes dans le suivi des consommations. Ces pratiques compromettent gravement la fiabilité des services publics.
La population en première ligne
Les répercussions de cette crise frappent directement les citoyens. Dans l’Estuaire, les habitants subissent des délestages intempestifs et reçoivent des factures déconnectées de leur consommation réelle. Les associations de consommateurs, qui dénoncent les coupures fréquentes et les factures gonflées qui plombent les budgets familiaux, réclament une transparence accrue sur l’allocation des fonds et une rectification rapide des erreurs facturielles.
Ce trou financier colossal pèse lourdement sur l’économie nationale. Il compromet les investissements nécessaires dans les services essentiels et alimente une dette record de la SEEG. La société a d’ailleurs récemment lancé un ultimatum à ses abonnés pour la régularisation de leurs arriérés.
L’analyste économiste Gyslain Mapangou Mapangou met en garde : « Ces écarts révèlent un manque de transparence et de contrôle dans le système de facturation actuel. Il est urgent de renforcer le suivi des consommations et de moderniser les compteurs afin d’assurer que chaque citoyen paie exactement ce qu’il doit, tout en protégeant les finances publiques. »
Le gouvernement promet des réformes
Pour contrer cette spirale, les autorités ont dévoilé un plan d’action. Il est prévu une révision exhaustive des factures pour traquer les surfacturations, une normalisation des comptes entre usagers et fournisseurs, des poursuites judiciaires contre les coupables de négligence ou de complicité, et l’instauration d’audits périodiques pour un contrôle accru.
Le ministre de l’Énergie et de l’Eau a également promis des protocoles plus sévères pour fiabiliser les prestations et regagner la confiance des Gabonais. La scission potentielle de la SEEG en entités distinctes (eau et énergie) est par ailleurs envisagée pour moderniser la gestion du secteur.


