5 candidats pour un fauteuil. C’est le tableau qu’affiche l’élection à la présidence de la Banque africaine de développement, depuis fin janvier 2025. Qui de Sidi ould Tah (Mauritanie), Swazi Tshabalala (Afrique du Sud), Mahamat Abaas Tolli (Tchad), Amadou Hott (Sénégal), Samuel Munzele Maimbo de la Zambie, succédera à Akinwumi Adésina ? La réponse ce 29 mai 2025. La BAD aura ainsi un nouveau président, après deux mandats (10 ans) du Nigérian.
La course à la présidence de la BAD s’achève demain. Qui des cinq candidats franchira le premier, la ligne d’arrivée ? L’on saura ce jeudi. Chacun des candidats s’est déployé à sa façon, pour essayer d’obtenir des soutiens et surtout convaincre les grands porteurs de voix notamment, le Nigeria, les États-Unis, l’Égypte, le Japon, l’Algérie, l’Afrique du Sud, le Maroc, l’Allemagne, le Canada, la France et la Côte d’Ivoire, sans lesquels il serait difficile pour un potentiel postulant de passer. Mais aussi, il a fallu séduire les 54 pays africains et les 27 non africains, actionnaires de la Banque africaine de développement.
Sidi Ould Tah, très agile durant la campagne
C’est le dernier candidat déclaré pour l’élection à la tête de la Banque africaine de développement. Pourtant, il s’en sort comme un cheval gagnant. Très agile durant la campagne, le Mauritanien né le 31 décembre 1964, est un visage bien connu dans l’écosystème financier africain. Ex-ministre de l’Economie et des Finances de la Mauritanie, il a dirigé la Banque Arabe pour le développement économique en Afrique (Badea) pendant 10 ans. Titulaire d’un doctorat en économie de l’université de Nice Sophia Antipolis en France, il a occupé les postes de chargé du marketing des investissements puis d’assistant technique du président du groupe de la banque islamique pour le développement (BID).
L’homme et ses soutiens
La candidature du Mauritanien a connu de nombreux soutiens. En Afrique de l’Ouest, l’Economie a appris que sa candidature est parrainée par le Alassane Ouattara, président de la République de Côte d’Ivoire. Cet appui de taille « peut lui ouvrir d’autres portes au-delà du continent, notamment en Europe où il peut bénéficier des votes de la France et de l’Espagne qui ont des relations privilégiées avec la Mauritanie ».
Le 5 mai 2025, c’était au tour du Bénin de se prononcer publiquement. Le pays dirigé par Patrice Talon a décidé de soutenir la candidature de Sidi Ould Tah à la Présidence de la BAD. « Notre frère Sidi Ould Tah a le profil et les compétences requises pour faire de la BAD le véritable outil de développement dont le continent a besoin aujourd’hui. À cet effet, nous lui apportons notre soutien et sommes prêts à mobiliser l’ensemble de nos partenaires autour de cette candidature », indiquait la délégation béninoise reçue en audience à cet effet, par Mohamed Cheikh El Ghazouani, Président de la République Islamique de Mauritanie.
Le Mauritanien qui bénéficie aussi des soutiens de l’Arabie saoudite et des pays du Golfe, membres de la BAD (Émirats arabes unis et Koweït), ne s’est pas limité à ce qui semblait déjà acquis. La parade diplomatique s’est poursuivie au Ghana où, le candidat, accompagné de Sid’Ahmed Ould Bouh, ministre mauritanien de l’Économie et des Finances, ont tenu une réunion de haut niveau avec John Dramani Mahama, Président de la République du Ghana. Quelques jours plus tard au Cameroun, Amal Mint Maouloud, Ministre mauritanienne de l’Hydraulique et de l’Assainissement a été reçue au Palais de l’Unité par Ferdinand Ngoh Ngoh, Secrétaire général de la Présidence de la République. Objectif du périple, obtenir leurs voix pour cette place stratégique à la tête de la BAD.
Sidi Ould Tah s’en va à ces élections les armes bien affutées. Au-delà d’une connaissance approfondie des problématiques économiques et sociales de l’Afrique, le Mauritanien parle plusieurs langues dont, l’anglais et le français, exigées pour un potentiel poste à la présidence de la BAD.
Le candidat de l’Afrique Centrale peu visible
On ne l’a pas trop vu. Le financier tchadien est pourtant le premier à se déclarer candidat à la présidence de la BAD. Une stratégie peut-être ? agir sous silence, loin des projecteurs. Abbas Mahamat Tolli, est le candidat adoubé par les chefs d’Etat de la Communauté Économique des États de l’Afrique Centrale (CEEAC). Il bénéficie surtout du soutien du président tchadien, Mahamat Idriss Déby Itno « qui a lancé une campagne tous azimuts auprès de ses pairs ».
Né en avril 1972 à Abeché au Tchad, l’ancien gouverneur de la Banque des Etats de l’Afrique centrale (BEAC), est diplômé de l’École nationale d’administration (ENA) de Paris et de l’Université du Québec. Dans son pays, il a été directeur du Cabinet civil de la présidence, directeur des Douanes et des droits indirects, ministre des Finances et du budget, ministre des Infrastructures et équipements. Il a par ailleurs été président de la Banque de développement des États de l’Afrique centrale (BDEAC) et secrétaire général de la Commission bancaire de la Cemac. Comme candidat à la présidence de la BAD, Abbas Mahamat Tolli met en avant son expérience en matière de stabilité macroéconomique et de gestion monétaire, en vue de renforcer la solidité financière de la BAD.
Swazi Tshabalala, seule femme en lice
Fin 2024, la Sud-africaine a démissionné de ses fonctions de Vice-présidente principale du Groupe de la Banque africaine de développement. C’était suite à l’approbation par le gouvernement sud-africain de sa candidature au poste de président de la Banque africaine de développement en 2025. « J’ai pris la décision de démissionner immédiatement de la Banque. Cette décision est conforme aux règles et règlements de la Banque, et vise à éviter tout conflit d’intérêt potentiel dans le cadre de ma candidature », a-t-elle indiqué.
Pour cette élection, elle est la seule femme dans la course. Swazi Tshabalala a rejoint la Banque africaine de développement en 2018 en tant que Vice-présidente en charge des finances et Responsable financière du Groupe de la Banque et a été nommée Vice-présidente principale en novembre 2021, devenant ainsi la première femme à occuper ce poste. Âgé de 58 ans, elle est titulaire d’une licence en économie de l’Université Lawrence (1989) et d’un MBA de l’Université Wake Forest (1992) aux Etats-Unis, Bajabulile Swazi Tshabalala jouit d’une longue expérience de près de 30 ans dans les domaines de la finance, de la gestion de la trésorerie, des opérations sur les marchés des capitaux et des investissements.
Pour elle, il faut « repenser le financement du développement en Afrique ». Si jamais elle est élue, elle entend inscrire l’accès à l’électricité en première loge des projets à réaliser. Pendant la campagne, elle n’a pas été visible.
Samuel Munzele Maimbo, l’economiste zambien qui rêve de diriger la BAD
L’économiste zambien a fait carrière à la Banque mondiale. Samuel Munzele Maimbo bénéficie du soutien des chefs d’État et de gouvernement du marché commun de l’Afrique orientale et australe (Comesa). Outre le choix de la région, on parlait également du soutien des pays anglo-saxons, notamment des Etats-Unis, second actionnaire de la BAD, du Royaume-Uni et de l’Irlande, mais aussi de nombreux autres pays occidentaux.
Depuis le 1er juillet 2023, Samuel Munzele Maimbo est vice-président du budget, de l’examen des performances et de la planification stratégique au sein de la Banque mondiale. Avant celà, il a été chef de cabinet de deux présidents de la Banque mondiale, David Malpass et Ajay Banga.
Il possède près de 30 ans d’expérience dans le développement, les marchés financiers, la mobilisation des ressources et la planification stratégique dont 23 ans au sein de la Banque mondiale. Plus tôt, il a été inspecteur bancaire à la Banque de Zambie et auditeur chez PricewaterhouseCoopers (PwC). Pour sa candidature, le Zambien défend l’importance de la gouvernance, de la transparence et de l’intégration régionale, comme des leviers pour le développement de l’Afrique. Pendant la campagne, il s’était rendu au Cameroun pour solliciter le soutien des autorités. Il y a quelques jours, il sollicitait également le soutien du Gabon pour son élection à la présidence de la BAD.
Amadou Hott, candidat « maison »
Le Sénégalais connaît bien la maison qu’il veut diriger. Amadou Hott y a été pour des fonctions de vice-président, de chargé de l’électricité, de l’énergie, de la croissance verte et du changement climatique. Plus récemment, il a été en tant qu’envoyé spécial du président de la BAD, chargé de l’Alliance pour l’infrastructure verte en Afrique.
Diplômé de l’Université Paris I Panthéon-Sorbonne où il obtenu la Licence et la Maitrise en Science économique, option Monnaie et finance et un DEA en Finance de marché et gestion bancaire, Amadou Hott aurait des soutiens de haute facture. Des sources informent qu’outre Adésina, président sortant, le Sénégalais a l’appui d’Aliko Dangote et Tony Elumelu.
Il cumule une vingtaine d’années d’expérience dans des domaines variés tels que le financement structuré, la banque d’investissement, la gestion de fonds souverains, les infrastructures et développement de solutions énergétiques intégrées à New York, Londres, Dubaï et Lagos. Ancien ministre de l’Économie, du Plan et de la Coopération du Sénégal, il est titulaire d’un master en mathématiques financières de l’Université de New York.
Demain c’est le grand jour où, un seul des 5 postulants sera élu, président de la Banque africaine de développement.