Lors des 32e Assemblées annuelles d’Afreximbank de cette année, un panel a dressé un bilan approfondi, s’interrogeant non seulement sur les acquis des trois dernières décennies, mais aussi sur les enseignements à en tirer. Intitulée « Trois décennies au service de la résilience et de la transformation de l’Afrique : que nous apprend l’expérience d’Afreximbank ? », cette table ronde a réuni des voix issues de l’ensemble du paysage économique du continent. Parmi les intervenants figuraient Kee Chong Li, directeur de Value Partners Asia Hedge Funds et membre du conseil d’administration d’Afreximbank, le professeur Bart Nnaji, PDG de Geometric Power, Aliyu Ahmed, ancien secrétaire permanent du ministère fédéral des Finances du Nigéria, Rosa Whitaker, présidente-directrice générale du Whitaker Group ; et l’honorable Patrick Chi-namasa, ancien ministre des Finances et du Développement économique du Zimbabwe. Chacun a présenté des réflexions pertinentes sur la manière dont Afreximbank est passée du statut d’institution de financement du commerce à celui de moteur essentiel de la résilience et de la transformation économiques de l’Afrique. Depuis sa création, Afreximbank s’est distinguée non seulement par ses activités, mais aussi par son approche fondamentale. Comme l’a observé un intervenant, Afreximbank est « une institution des Africains, par les Africains, et adaptée au développement de l’Afrique ». Ce sentiment d’appartenance et cet alignement stratégique ont façonné son caractère institutionnel et son impact durable.
Résilience par la conviction
Au cœur des discussions se trouvait un principe qui dépasse la finance traditionnelle : une conviction inébranlable dans le potentiel africain. Cette conviction s’est manifestée par une confiance dans les économies africaines, leur leadership et leurs solutions locales. L’ancien ministre des Finances du Zimbabwe, l’honorable Patrick Chinamasa, a fourni un exemple frappant de cette approche. Il a rappelé comment, pendant la période où le Zimbabwe était soumis aux sanctions internationales, Afreximbank avait apporté un soutien essentiel lorsque d’autres institutions se retiraient. « Personne ne nous a donné notre chance, sauf Afreximbank », a-t-il noté, reconnaissant que l’intervention de la Banque avait aidé le Zimbabwe à atteindre l’autosuffisance alimentaire et à relancer son processus d’industrialisation.
Ce schéma s’est reproduit sur tout le continent. Du Nigéria à l’île Maurice, les intervenants ont partagé des témoignages sur la réponse rapide de la Banque à la crise lorsque d’autres se retiraient, établissant ainsi sa réputation de « premier intervenant » financier en Afrique.
L’indépendance financière comme stratégie principale
Une caractéristique essentielle de la trajectoire d’Afreximbank a été sa quête délibérée de souveraineté financière. Plutôt que de s’appuyer sur les canaux conventionnels de mobilisation de capitaux, la Banque a constamment développé des alternatives pilotées par des Africains. Kee Chong Li, membre du conseil d’administration et expert financier senior, a illustré cette philosophie par une transaction spécifique. Lors de la levée de capitaux par le biais de certificats représentatifs d’actions étrangères, la Banque a contourné les banques d’investissement internationales comme JP Morgan ou Goldman Sachs. Elle a privilégié la mobilisation d’institutions et d’investisseurs privés africains, cotés à la Bourse de Maurice et fait appel à des services de garde locaux. « Toutes les institutions qui ont permis la levée de capitaux étaient purement africaines », a-t-il souligné. « Cela illustre ce que signifie concrètement la souveraineté. »
Cette approche s’est étendue à la gestion des risques. Face à la réticence des assureurs internationaux à garantir des projets africains, Afreximbank a créé sa propre division d’assurance-crédit, composée de professionnels africains, soutenue par des réassureurs africains et spécialement conçue pour débloquer des capitaux pour les infrastructures et le développement commercial du continent.
Leadership : Transformer la vision en réalité
De nombreux intervenants ont souligné le leadership transformationnel du président d’Afreximbank, le professeur Benedict Oramah, qui a joué un rôle déterminant dans l’évolution de la Banque. Rosa Whitaker, présidente du Whitaker Group, a souligné cette dynamique, citant l’expert en gestion Jim Collins : « Le “qui” compte plus que le “quoi”. » Sous la direction du professeur Oramah, a-t-elle affirmé, la Banque a « catalysé un mouvement » qui intègre le financement du commerce, la technologie, l’engagement de la diaspora et les marchés de capitaux africains au sein d’un moteur de croissance cohérent. Elle a qualifié ce phénomène d’« effet Africatalyst » : une force catalytique qui transforme les aspirations en progrès économiques mesurables.
Du financement du commerce à une transformation globale
Cette évolution a été illustrée par le témoignage du professeur Bart Nnaji. En tant que PDG de Geo-metric Power, il a décrit un projet énergétique intégré au Nigéria, auparavant bloqué, que d’autres financiers avaient abandonné. Après une due diligence rigoureuse, Afreximbank s’est engagée à relancer le projet. Aujourd’hui, il fournit une électricité fiable à plus de quatre millions de personnes et constitue le point d’ancrage d’une zone industrielle florissante, démontrant le potentiel lorsque le financement du commerce, le développement des infrastructures et l’approvisionnement en énergie s’alignent stratégiquement.
Un cadre pour le développement du continent
Comme l’a conclu le panel, un principe est clairement apparu : l’Afrique doit développer ses propres capacités financières. Comme l’a observé M. Aliyu Ahmed, ancien secrétaire permanent au ministère des Finances du Nigéria, « les faits démontrent systématiquement que lorsque d’autres banques se retirent, Afreximbank progresse. » De l’intervention en cas de crise à la stratégie industrielle à long terme, la Banque a démontré à maintes reprises ce qui devient possible lorsque les capitaux et les dirigeants africains dirigent leur propre programme de développement.
Après trois décennies, l’expérience Afreximbank apporte une réponse concrète à une question fondamentale : quels sont les éléments nécessaires pour bâtir des institutions à la fois durables et transformatrices ? La réponse ne semble pas résider uniquement dans la structure organisationnelle ou les cadres politiques, mais dans le courage institutionnel, l’innovation stratégique et l’alignement des objectifs sur la pratique.
Alors que le continent est confronté à de nouveaux défis et opportunités, le parcours d’Afreximbank offre plus qu’une simple analyse historique. Il fournit un cadre opérationnel pour le développement institutionnel africain.
Source : Afreximbank