Règlementation des changes : Nouvelle pression sur les industries extractives
(leconomie.info) A l’issue de laConférence des Chefs d’Etat de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique Centrale, elles ont une fois de plus été appelées à rapatrier les avoirs en devises détenus à l’extérieur de la Cemac.
Le Cameroun a accueilli le 16 décembre 2024, une session extraordinaire de la Conférence des Chefs d’Etat de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique Centrale (Cemac). Le thème principal choisi pour les travaux était : « évaluation de la situation et perspectives économiques, monétaires et financières de la Cemac : mesure de consolidation de la résilience ». Cette session s’est tenue dans un contexte marqué par un endettement élevé des pays de la Cemac, par des déséquilibres budgétaires et extérieurs croissants, ainsi que des problèmes de diversification économique et de gouvernance.
La session s’est également tenue dans un contexte où le niveau de réserves de changes est passé de 2,3 mois d’importations en 2016 à 4,6 mois d’importations en 2023, où les biens et services connaissent depuis 2024, une tendance baissière et où les perspectives des cours des matières premières et du commerce international s’annoncent défavorables. Conséquences, de nouveaux efforts s’avèrent nécessaires pour améliorer le cadre macroéconomique de la sous-région « en accélérant la diversification économique et la consolidation des finances publiques ».
Au terme des assises, la conférence des Chefs d’Etat a réaffirmé « l’application intégrale de la Réglementation des changes, notamment à travers le rapatriement diligent des devises par les opérateurs économiques, et plus particulièrement la signature avant le 30 avril 2025, des conventions de compte séquestre pour les fonds de restauration des sites (Fonds RES) par les entreprises extractives (pétrolière et minières) ». Il faut souligner que le rapatriement des Fonds RES est prévu dans le règlement de changes mais son application reste difficile.
Or, selon une étude menée par la Direction des études de la recherche et des statistiques de la Beac, rapatrier les fonds dédiés à la restauration des sites miniers ferait gagner jusqu’à 3 658 milliards FCFA à la Cemac. Aujourd’hui, l’intégralité de ces ressources apprend-on, sont logés hors de la Cemac du fait « des stipulations contractuelles qui prévoient en général leur domiciliation dans des banques internationales notées au moins AA et choisies d’un commun accord avec l’Etat ». Selon les chercheurs de la Beac, si ces ressources étaient rapatriées dans la Cemac, elles permettraient de « renforcer le niveau de réserves de change et donc la stabilité externe de la monnaie commune qui est le FCFA ».
Encore des devises à rétrocéder à la Banque Centrale
Le rapport sur la politique monétaire consulté par l’Économie fait état de ce que les réserves de changes de la Banque des Etats de l’Afrique centrale (Beac) augmentent depuis novembre 2023, pour se hisser à 6 863,0 milliards de FCFA, en hausse de 1,4% sur un an. Cette dynamique s’explique essentiellement par les efforts de rapatriement des recettes d’exportation, notamment l’augmentation des rétrocessions des devises par les banques primaires pour le compte de leur clientèle du secteur extractif autorisée à détenir des comptes en devises. Dans le même sillage, le taux de couverture extérieure de la monnaie est passé de 72,9% à fin janvier 2024 contre 73,3% à la même période en 2023.
« Il faut souligner que l’attitude de certains opérateurs économiques de la Cemac n’a pas toujours favorisé la hausse des réserves de change. Plusieurs d’entre eux veulent toujours se soustraire de l’obligation de rapatrier les devises issues de leurs activités à l’extérieur de la zone Cemac comme l’exige la nouvelle règlementation de changes », explique un économiste.
Depuis l’entrée en vigueur en 2019 du nouveau règlement sur le change, les devises rétrocédées à la banque centrale ont presque doublé, passant de 6 201 milliards de FCFA en 2019 à 11 946 milliards de FCFA en 2022, selon les données de la Beac. Cette progression s’est davantage accélérée en 2023 avec l’application dudit règlement aux entreprises du secteur extractif qui, en l’espace de 5 mois ont rapatrié 765 milliards de Fcfa de devises dans cette région, représentant plus de 10 % des réserves de changes. Les Chefs d’Etat de la Cemac ontinvité le FMI, la Banque mondiale et tous les autres partenaires à accompagner les Etats et la Banque Centrale dans le processus de rapatriement et de domiciliation des revenus pétroliers.