Le Cameroun a accueilli du 28 octobre 2024 au 1er novembre 2024, la 46ème session ordinaire du Conseil des Ministres de l’Organisation des producteurs de pétrole africains (Appo). C’était la 4ème fois pour le pays d’abriter la présidence tournante de cette organisation après janvier 1989, novembre 1996 et mars 2008. Cette dernière session selon Adolphe Moudiki, directeur général de la Société nationale des hydrocarbures (SNH), par ailleurs président en exercice de l’Appo 2024 « avait permis de mettre en œuvre une série de réformes qui ont contribué à faire de l’Appo aujourd’hui une organisation moderne et efficace ». Notamment l’élaboration d’un manuel de procédures visant l’amélioration de la gestion administrative, financière et comptable. « …Notre organisation permet d’établir des relations fructueuses, ce qui représente un atout considérable pour le développement de l’industrie pétrolière et gazière en Afrique », souligne-t-il.
La rencontre 2024 a eu lieu à Yaoundé dans un contexte où l’Appo est confronté à un défi majeur. Garantir l’accès à l’énergie à près d’un milliard d’habitants qui en sont privés. Dans un contexte où on préconise de s’éloigner des énergies fossiles au nom de la transition énergétique, l’Appo pense que ce n’est pas encore le moment pour l’Afrique d’abandonner les énergies fossiles. Inquiet des implications de la transition énergétique pour les pays producteurs de pétrole et de gaz, dont les économies dépendent des revenus pétroliers et gaziers, le Conseil des ministres de l’Appo a commandé en 2020 une étude sur l’Avenir de l’Industrie Pétrolière et Gazière en Afrique à la Lumière de la Transition Energétique. L’étude achevée fin 2021, a mis en évidence les défis imminents que la transition énergétique pose à l’industrie pétrolière et gazière africaine.
Ils ont été présentés à Yaoundé vendredi dernier par Jean-Richard Itoua, ministre des Hydrocarbures de la République du Congo et vice-président de l’Appo. C’était lors de la séance plénière de la 46ème session du Conseil des ministres de l’Appo en présence de Joseph Dion Ngute, Premier ministre, Chef du gouvernement.
Les défis qu’il faut relever
« Le premier est celui du financement. L’étude note que depuis que nous produisons du pétrole et du gaz, nos pays dépendent fortement des financements extérieurs. Les pays industrialisés dont nous dépendions pour le financement des projets pétroliers et gaziers ont décidé de ne plus financer le pétrole et le gaz, en particulier en Afrique. Et ils élaborent des politiques qui sanctionnent le financement du pétrole et du gaz, en particulier en Afrique. Le deuxième défi est celui de la technologie et de l’expertise. Là encore, l’Afrique a été fortement dépendante des technologies développées en dehors du continent pour l’exploitation de ses ressources pétrolières et gazières. Maintenant, ceux dont nous dépendions ont décidé de cesser de nous fournir des technologies pétrolières et gazières en fermant leur institut de recherche sur le pétrole et le gaz » souligne Jean-Richard Itoua.
Il ajoute : « Le dernier défi est celui des marchés. L’étude a établi que 75 % du pétrole que l’Afrique produit et 45 % du gaz sont exportés en dehors de l’Afrique. En l’absence de ces marchés, allons nous arrêter de produire du pétrole et du gaz, alors que nous avons la plus grande proportion de notre population qui vit sans accès à l’énergie ».
Selon les statistiques, 600 millions d’Africains n’ont pas accès à l’électricité et près d’un milliard n’ont accès à aucune forme d’énergie moderne pour la cuisine et les usages domestiques comme le chauffage.
Banque africaine de l’énergie
Pour relever le Premier défis, l’Appo s’est associée à Afreximbank pour créer la Banque Africaine de l’énergie, dont l’objectif est de combler le déficit de financement créé par le retrait des financeurs traditionnels des projets pétroliers et gaziers en Afrique. « Pour montrer l’engagement de nos pays membres envers la Banque, nous avons été capables de lever 50% du capital minimum nécessaire pour démarrer avant même que la Banque n’ait pris son envol…Nous lançons un appel à tous les Pays membres de l’APPO pour qu’ils souscrivent et paient les parts qui leur sont allouées dans le capital social de la Banque Africaine de l’énergie. L’Afrique ne peut pas se permettre de ne pas voir cette banque créée dans les prochains mois. Le train de la transition énergétique est en marche et n’attendra pas l’Afrique. Nous devons être prêts. Nous ne devons pas être pris au dépourvu » précise Jean-Richard Itoua
Pour relever le défi de la technologie, l’APPO a créé le Forum des PDG des SNH de l’APPO. Ceux-ci ont à leur tour créé le Forum des Directeurs d’Institutions de Recherche et d’Innovation ainsi que le Forum des Directeurs d’Institutions de Formation, dans le but de relever le défi de la technologie. Concernant le défi du marché, l’APPO apprend l’Economie s’est associée au Central Africa Business Energy Forum (CABEF) pour promouvoir le Central Africa Pipeline System (CAPS).
Le CAPS est considéré comme un projet d’infrastructure énergétique essentiel qui reliera 11 États d’Afrique centrale par un système complet de pipelines de pétrole brut, de produits et de gaz pour nous permettre d’acheminer l’énergie des zones d’abondance vers les zones de besoin. Le Secrétariat de la Cemac a déjà approuvé les documents du CAPS qui seront inscrits à l’ordre du jour du prochain Sommet des Chefs d’Etat de la Cemac. L’on espère que ces initiatives vont être accéléré pour que l’Afrique prenne son destin en main pour ce qui est de l’exploitation pétrolière et gazière.
Après le Cameroun, c’est au tour la République du Congo d’assurer la présidence en exercice de l’Appo qui aujourd’hui compte 18 membres actifs. L’Appo est une organisation qui a 37 ans d’existence. Elle a vu le jour à Lagos au Nigeria le 27 janvier 1987 à l’initiative de 8 pays africains. L’objectif de ce regroupement est de servir de plateforme pour la coopération, la collaboration, le partage des connaissances et des compétences entre les pays africains producteurs de pétrole.