Le 20 janvier 2025, Donald Trump a officiellement pris fonction en tant que 47ème président des Etats-Unis. Le même jour, il a signé une ordonnance instruisant « l’arrêt provisoire et immédiat de tous les financements à l’aide au développement apporté par les Etats-Unis d’Amérique à tous les pays ». C’est ainsi que le projet Safecare qui bénéficie des financements américains et appuie le gouvernement dans la riposte au VIH/SIDA à travers l’association Shwari Health Association Cameroon (SHAC), a été momentanément suspendu depuis le 29 janvier 2025. Ce projet ne pourra reprendre « qu’après une nouvelle autorisation de l’exécutif américain ». Le personnel associé à ce projet est également mis en congé technique.
« Lorsqu’on nous a annoncé qu’on devait arrêter le travail, ça a été un choc. Parce que c’était brusque. Nous ne savons pas combien de temps cette décision va durer. Nous devons, en attendant chercher un autre travail qui peut nous permettre de joindre les deux bouts. Nous sommes surtout soucieux pour les patients. Que vont-ils devenir sans l’accompagnement ? », s’interroge Josiane T qui était employée dans le projet Safecare.
Dans un communiqué signé le 3 février 2025, Manaouda Malachie, ministre de la Santé publique a informé que le Pepfar (Plan d’urgence américain visant à mettre fin à l’épidémie du VIH/SIDA dans le monde Ndlr) et qui couvre plus de 20 millions de bénéficiaires dans 55 pays et l’Initiative du Président américain pour le paludisme (PMI) sont temporairement suspendus au Cameroun pour une durée de 90 jours.
« Aucun nouveau fonds ne sera engagé (…) tant que chaque nouvelle attribution ou extension proposée n’aura pas été examinée et approuvée » en conformité avec le programme du président Donald Trump, indique une circulaire interne du secrétaire d’État américain, Marco Rubio, adressée au personnel du département d’État.
Face à cette suspension du financement Pepfar et de PMI, Manaouda Malachie souligne que le gouvernement a mené « une évaluation exhaustive de l’impact direct et potentiel de cette suspension sur les programmes du VIH /SIDA, de la tuberculose, et du paludisme et a dégagé des actions de mitigation à court, moyen et long terme pour assurer la continuité de la lutte contre les trois maladies ». Les actions qu’évoque le membre du gouvernement n’ont pas été détaillées. Cependant, Manaouda Malachie souligne que le gouvernement « va continuer à assurer la continuité des services contre le VIH, la tuberculose et le paludisme », sur l’étendue du territoire national.
Trouver des solutions souveraines de lutte
« Au Cameroun nous sommes habitués aux grandes annonces. Si la suspension des subventions des Etats-Unis dure, notamment pour ce qui est du Sida, l’on pourra assister à une probable progression de la prévalence et de la mortalité liée au VIH/Sida. Le gouvernement doit dès maintenant trouver d’autres solutions étrangères ou souveraines de lutte contre cette maladie avant qu’il ne soit tard », préconise un analyste des questions de santé.
Selon l’Organisation mondiale de la santé, le VIH/sida demeure un problème de santé publique majeur au Cameroun, avec une épidémie généralisée et une prévalence supérieure à 1% dans toutes les populations cibles.
Bien que la prévalence du VIH soit passée de 5,4 % en 2018 à 2,7 % en 2024 selon les statistiques de l’OMS, les jeunes âgés de 15 à 24 ans représentent la tranche d’âge la plus touchée. Le Cameroun a enregistré 3 220 nouveaux cas de VIH/Sida en 2024.
C’est pourquoi l’OMS est très préoccupée par les conséquences de la suspension immédiate du financement des programmes de lutte contre le VIH dans les pays en développement (comme le Cameroun, Ndlr). « L’arrêt du financement des programmes de lutte peut exposer immédiatement les personnes vivant avec le VIH à un risque accru de maladie et de décès et saper les efforts de prévention de la transmission dans les communautés et les pays. S’il se prolonge, cet arrêt du financement pourrait entraîner une augmentation du nombre de nouvelles infections et de décès, et remettre en cause des décennies de progrès. Le monde retrouverait alors la situation qu’il a connue dans les années 1980 et 1990, où des millions de personnes mouraient de l’infection à VIH chaque année, y compris aux États-Unis d’Amérique », souligne l’OMS qui espère voir le président Donald Trump revenir le plutôt sur sa décision.